XXXIX A CELLE QUI EST TROP GAIE
Ta tęte, ton geste, ton air
Sont beaux comme un beau paysage ;
Le rire joue en ton visage
Comme un vent frais dans un ciel clair.
Le passant chagrin que tu frôles
Est ébloui par la santé
Qui jaillit comme une clarté
De tes bras et de tes épaules.
Les retentissantes couleurs
Dont tu parsčmes tes toilettes
Jettent dans l’esprit des počtes
L’image d’un ballet de fleurs.
Ces robes folles sont l’emblčme
De ton esprit bariolé ;
Folle dont je suis affolé,
Je te hais autant que je t’aime!
Quelquefois dans un beau jardin,
Oů je traînais mon atonie,
J’ai senti comme une ironie
Le soleil déchirer mon sein ;
Et le printemps et la verdure
Ont tant humilié mon cur
Que j’ai puni sur une fleur
L’insolence de la nature.
Ainsi, je voudrais, une nuit,
Quand l’heure des voluptés sonne,
Vers les trésors de ta personne
Comme un lâche ramper sans bruit,
Pour châtier ta chair joyeuse,
Pour meurtrir ton sein pardonné,
Et faire ŕ ton flanc étonné
Une blessure large et creuse,
Et, vertigineuse douceur!
A travers ces lčvres nouvelles,
Plus éclatantes et plus belles,
T’infuser mon venin, ma sur!